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qu’il était, avait déjà une propriété à lui, et caressait, par suite, l’espoir d’obtenir Martscha pour femme.

Pista était le seul à qui elle permit de dormir sur le gazon du parc, au-dessous de ses fenêtres, dans les tièdes nuits d’été, enveloppé dans sa bunda velue, et il se montrait très heureux de cette faveur.

Tout le monde admirait Pista, car chacun pensait qu’il fallait du courage pour faire la cour à cette fille sauvage et aspirer à sa main. Pareille à une Indienne ou à une Tartare du désert mongol, Martscha possédait en même temps le cœur doux d’une colombe et les instincts cruels de la race féline.

Un jour le propriétaire du château essaya de seller un jeune cheval. C’était en vain que deux hommes vigoureux s’efforçaient de le maintenir : il ruait, se cabrait et se montrait indomptable.

Alors arriva Martscha, une cravache à la main. Elle saisit l’animal fougueux par la crinière, sauta sur son dos avec la souplesse et la rapidité d’un lynx, et se mit à le fouetter à tour de bras. L’animal eut beau s’efforcer de la jeter bas, il eut beau cabrioler et faire des bonds de bête fauve, Martscha, les yeux étincelants, un sourire malicieux sur les lèvres entr’ouvertes,