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village de Hort, servait dans un petit château au pied de la montagne de Matra. Le château, entouré d’un parc abandonné et d’un jardin peu cultivé, couronnait une petite hauteur sur la pente de laquelle on voyait les bâtiments d’exploitation et les toits du village à moitié caché derrière des arbres fruitiers. Au-delà, se perdant à l’horizon, une vaste plaine miroitante, des champs et des pâturages, dont un rideau de montagnes bleuissantes formaient, pour ainsi dire, la décoration du fond, avec des bosquets de grands chênes çà et là. En deçà de cette plaine, des vignes fertiles descendaient jusqu’à la haie vive qui renfermait le manoir seigneurial.

Martscha était la fille d’un paysan aisé. Placée au château pour se perfectionner dans les travaux domestiques, elle y avait appris à faire la cuisine, à coudre, à repasser, à broder et divers autres ouvrages manuels. Ses compagnes, d’une condition inférieure, la considéraient comme une sorte de merveille, quelque chose comme une princesse enchantée. Elle paraissait, en effet, plutôt, gouverner dans ce manoir qu’y servir.

Quand, pendant la semaine, elle traversait la cour du château dans une attitude fière, en chemise de toile grossière et en jupon court, les