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verser une somme déterminée et à les entretenir princièrement chaque fois qu’ils viendraient lui demander l’hospitalité. À ces conditions, le magnat et ses gens étaient assurés contre toute attaque, contre tout meurtre ou toute déprédation de la part des brigands.

Un beau jour les brigands firent annoncer leur visite. On se prépara à leur faire faire ripaille et à les divertir. De la cave, on monta des futailles de vin vieux, on engagea des musiciens tsiganes et des filles. Bientôt survinrent les brigands qui firent bonne chère, eurent franches lippées et se réjouirent à leur guise. Ils étaient en train de valser gaiement aux sons d’un czardas[1], quand un de leurs espions accourut tout à coup leur annoncer l’imminente arrivée des dragons.

En un clin d’œil, ils furent sur leurs chevaux, toujours sellés d’avance, piquèrent des deux et brûlèrent la politesse aux envoyés du roi.

Le châtelain fut vivement contrarié de cet incident : les brigands, pensa-t-il, n’allaient pas manquer de penser qu’il les avait trahis, et se vengeraient sur lui !

Comme il exprimait ces appréhensions à Kasimira, ce fut, pour celle-ci, comme un trait de

  1. Orchestre hongrois.