Page:Sacher-Masoch - Les Batteuses d’hommes, 1906.djvu/231

Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 203 —

Le soir, il lui apporta le poignard qu’elle passa dans sa ceinture. Au moment du thé, elle le tira inaperçue, décidée à porter le coup mortel, mais elle ne le fit pas.

— Je dois me donner du courage, pensa-t-elle en s’étirant le lendemain matin sur ses moëlleux oreillers. C’est aujourd’hui que la grande œuvre doit être accomplie. — Mais elle attendit en vain le maître de police au repas de midi, il ne vint que le soir ; en revanche, il était d’excellente humeur. — Comme vous voilà gai ! commença-t-elle, Séraph Pawlowitch, qu’avez-vous ?

— J’ai fait une superbe capture, répondit-il avec un froid sourire, — nous avons mis la main sur une imprimerie nihiliste.

Le hasard venait en aide à Warwara. — Vous avez sans doute déjà beaucoup de prisonniers ? dit-elle d’une voix calme. — La place ne vous fait-elle pas défaut ?

— Nous les serrons tout simplement comme des harengs, répartit Halikof, — il n’est pas question de prendre des ménagements.

— Qu’a-t-on fait de Semen Poultowski ?

— Vous le connaissez ?

— Il est de mon village.

— Il vit encore, bien que je l’aie, à plusieurs reprises, sévèrement interrogé. Cette sorte de garçons têtus est celle que je préfère.