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dant la réalisation de ce vœu, se contente de rehausser le niveau intellectuel du peuple, de l’instruire, de lui enlever les préjugés et les superstitions mis au service de l’Église et de l’État.

Elle restait trop femme pour ne pas commencer la transformation du monde par elle-même et par son extérieur ; mais, à coup sûr, ce ne fut pas la vanité qui guida sa main de jeune fille le jour où elle coupa l’abondante chevelure blonde qui l’enveloppait comme un manteau, et cela d’une manière si barbare et si ridicule que, désormais, elle ressembla plus à un jeune théologien qu’à une Vénus victrix. Elle ne se promenait plus qu’en hautes bottes, vêtue d’une jupe courte dépourvue d’ornements et d’une jaquette, et coiffée d’un chapeau rond de forme masculine : image vivante de l’amazone moderne dédaigneuse de toute coquetterie. Elle savait assez de médecine pour jouer dans le village et aux environs le rôle du docteur absent et celui de sœur de charité ; mais cela ne lui suffisait pas. Elle installa dans la maison de son père, une école populaire où elle instruisait enfants et adultes. Elle leur apprenait à lire, à écrire, à compter et leur inculquait les notions les plus élémentaires sur l’Univers, les lois physiques, le globe terrestre et ses habitants, ainsi que sur l’histoire de l’humanité. À part