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accompagné du vieux sergent Madorassi et d’un demi-peloton de hussards, il gravit la colline couronnée par le vieux château des starostes de Machow.

Ce château était un vaste édifice aux murailles élevées, grises, couvertes de mousse, et flanquées de plusieurs tours rondes et massives. Il rappelait plutôt ainsi les châteaux-forts des Dardanelles que les châteaux allemands des bords du Rhin. La lune, qui l’inondait à ce moment d’une lueur de plomb, lui donnait un aspect singulièrement fantastique et triste. L’entrée en était soigneusement fermée. Aucun bruit ne parvenait de l’intérieur, ou tout paraissait morne et désert. De temps à autre, seulement, le cri plaintif et mélancolique de la chouette.

Le capitaine donna l’ordre à son trompette de sonner un appel. Les premières notes, claires et joyeuses, se multipliaient dans le silence de la nuit, ne semblant éveiller, dans la vieille masure croulante, que de nombreuses chauves-souris qui se mirent à tourbillonner au-dessus de la tête des soldats. À l’intérieur, rien ne bougeait.

Ce ne fut qu’au troisième appel qu’on entendit des pas s’approcher lentement, puis le cliquetis d’un trousseau de clefs, et, enfin, le grincement enroué d’une porte qui s’ouvrait. Un vieillard dans le costume polonais du siècle passé, et dont