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Voici pour ton heureuse et ingénieuse trouvaille. Elle prit une pleine poignée de ducats et la glissa dans la main du bandit, puis elle ajouta : mais maintenant à cheval, autrement nous serions nous-même en danger.

En un clin d’œil tout le monde fut en selle et se mit à chevaucher l’un après l’autre.

Bethlémy se vit seul, livré sans espoir aux pires tortures, à la plus affreuse des morts ; il sentit les fourmis, d’abord, une par une, puis par véritables troupes, monter et descendre le long de son visage, comme conduites par un guide, puis elles se mirent à pénétrer dans ses oreilles ; dans son indicible désespoir, il se mit à faire ce qu’il n’avait pas fait depuis de longues, bien longues années, il se prit à prier, il versa des larmes devant Dieu, non pas pour sa délivrance, mais pour son salut et une prompte mort.

Soudain, des pas se firent entendre, qui se rapprochèrent de plus en plus et enfin Ursa parut devant l’infortuné. Elle le tapota légèrement de sa main ouverte sur le visage et dit en riant : Maintenant, comment vas-tu, Emerich ?

Bethlémy se tut.

— Serais-tu encore assez fou pour m’aimer, dis ?

— Tu m’as vendu et trahi, Ursa, et repayé