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de zibeline et orné de brandebourgs d’or. Sa belle tête au visage mat était relevée par une kutschma de zibeline surmontée d’une aigrette de plumes de héron. L’un des brigands s’empressa de tenir son cheval tandis que, légèrement, elle sautait à terre, puis s’approchait du feu.

— Or ça, dépêchez-vous, cria-t-elle, il est grand jour et les pandours chevauchent sur la Poussta.

Sur cette injonction, deux brigands arrachèrent leur captif de cheval, le jetèrent à terre comme une bête, lui lièrent ensuite les mains à l’aide d’une longue corde, puis le traînèrent comme un paquet dans la forêt ; au cours de ce court mais douloureux calvaire, la tête de l’infortuné portait à tout instant sur les racines noueuses que les grands chênes avaient jetées tout autour d’eux, ou sur quelques-unes des grosses pierres coupantes émaillant les sentiers de la forêt. Il était affreusement défiguré et le sang ruisselait de son pauvre visage, au moment où ses tortionnaires firent halte près d’un tronc d’arbre abattu, dans lequel une république d’industrieuses et laborieuses fourmis avait installé son siège. Les noirs petits insectes grouillaient tout autour cherchant la chaleur du soleil, peut-être aussi bien à ravir un morceau de butin à la tribu de fourmis voisine.