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soupirant et pleurant après un mot d’amour. Alors, elle se prenait à rire et le congédiait du pied, ou bien encore, elle s’emparait du fouet dont elle usait à l’égard de sa meute et l’en frappait comme un esclave, non,… comme un chien, et lui, jouissait de ces mauvais traitements, comme jamais il ne l’avait fait, comblé d’amour et de caresses dans les bras de sa femme.

Lorsque Sarolta l’eut enfin amené à un état voisin de la démence et qu’il eut menacé de se prendre la vie, si elle ne l’écoutait pas, elle lui signifia avec une froide hauteur qu’elle n’était pas femme à partager avec d’autres le cœur d’un homme, et posait, comme condition à ses faveurs la seule qu’elle put décemment accepter, c’est-à-dire, la place de sa femme et de ses enfants. Elle voulait ainsi ne pas précipiter son œuvre de vengeance, mais au contraire la goûter lentement, pas à pas.

Steinfeld était prêt à tous les sacrifices ; son unique pensée était de posséder la belle et démoniaque femme : c’était là son seul désir. Il partit pour Pesth ; là, il n’eût pas le courage de faire personnellement à sa femme la déclaration foudroyante qu’il ne l’aimait pas, ne l’avait jamais aimée et se sentait incapable de demeurer plus longtemps avec elle. Il la lui fit par une