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laissa de plus en plus prendre à chaque coup d’œil que lançaient ses yeux profonds et dominateurs. Après s’être vu plus d’une fois trompé dans son idéal ou, par sa propre passion, laissé conduire au bord de l’abîme, le baron, comme tous les hommes blasés et fatigués de jouissances, en était arrivé au point où une épouse douce, bonne et affectueuse, n’offre plus aucun attrait, où les nerfs détendus désirent à tout prix l’excitation et les fantaisies, que rien ne peut plus exciter ou enflammer, sinon les tortures qu’une femme sans cœur, coquette et cruelle inflige à l’homme assez faible pour devenir réellement, comme au figuré, son marchepied, et où la vie devient une jouissance et une volupté en raison même de la perfidie de la bien-aimée. Le baron Steinfeld, pour qui, comparés à la fidélité et à l’affection de sa femme, dont l’amour se bornait à lui témoigner ce qui constitue la pratique des vertus domestiques, la haine et le mépris d’une femme personnelle et altière auraient été un vrai délice et une consolation, sentit sa tête tourner aux éclats de rire provocateurs et aux paroles cajoleuses de Sarolta. Il devina chez elle une de ces natures impérieuses, enflammées et sans pitié qui lui annonçait tout ce qu’il souhaitait maintenant, et l’idée lui vint qu’elle l’exhortait clairement à