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polisson que lui jouait ce jeune gamin de Williams, elle ne tardait pas à y mettre fin à l’aide de cadeaux, de friandises et de soins quasi maternels. Si parfois, enfin, la signora Arabella se risquait à venir au manège pour l’exciter d’un coup de fouet, Sarolta lui baisait régulièrement la main après la leçon, disant avec une assurance stéréotypée, qu’elle s’estimait heureuse, d’être frappée par elle, car « la main qui aime bien, châtie bien ! »

Elle parvint ainsi, peu à peu à gagner tout le monde, à se rendre indispensable à tout le monde et, sans qu’elle s’en aperçut, à tirer parti de tout le monde.

Du directeur et de sa femme elle apprit un bon italien, de Monsieur Jacques le français le plus élégant ; Mister Brown, qui en réalité était hongrois et s’appelait Matschhausie, lui enseigna le magyar, sa propre langue, qu’elle parvint bientôt à parler comme une véritable hongroise. Quant à Miss Stanette, de son vrai nom Wilhelmine Sporner, native de Hanovre, elle l’aida à changer le doux dialecte viennois contre le rude et correct haut allemand.

Lorsqu’enfin, à Francfort-sur-le-Main, elle parut pour la première fois en public et remporta un éblouissant succès, elle, — jadis si maltraitée et raillée, — devint l’enfant gâté du