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quelqu’un, faisait les cent pas devant la maison de la Kärntnerstrasse où habitait le baron.

Comme le baron Steinfeld sortait de son hôtel, cette dame soigneusement voilée s’approcha rapidement de lui et lui dit :

— « Me connais-tu ? »

— Ne me faites aucune scène dans la rue, je vous en prie, fit le baron d’un ton bref.

— Alors que tu me fais chasser par tes valets, je n’ai plus qu’à te contraindre d’écouter en pleine rue les tristes choses qui me pèsent à te dire !

— Ce n’est point ici un lieu d’entretien.

— Accompagnez-moi chez moi, fit-elle.

Ces deux êtres qui, jadis, s’étaient passionnément aimés, cheminaient actuellement côte à côte, froids et muets. Toujours sans mot dire, ils gravirent l’un et l’autre l’escalier menant à la demeure d’Anna : cette demeure qui, autrefois, avait été leur paradis !…

Le baron jeta autour de lui un regard de surprise, il reconnaissait à peine ces lieux qui, cependant lui avaient été assez familiers, où Anna Klauer habitait encore, alors que lui-même les avait désertés depuis près d’une année.

Les tableaux et les miroirs de prix avaient