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dont les rayons répandaient sur les murailles grises une teinte dorée tout à fait en harmonie avec le caractère slavo-byzantin de l’édifice. La terrasse du perron était entourée d’espaliers de vigne où luisaient des grappes d’un rouge vermeil ; des roses rouges et blanches étaient semées sur la pelouse ; du parc, on entendait le roucoulement des pigeons sauvages, qui semblaient s’y trouver en nombre, et à toutes les corniches du château les hirondelles avaient collé leurs nids de torchis.

Alexandre parut bientôt sur le perron ; il me serra dans ses bras avec effusion, et ne cherchait pas à cacher les larmes qui brillaient dans ses yeux. Nous nous regardâmes quelques instants sans parler en nous tenant par les mains ; puis il m’introduisit dans un salon tendu de damas rouge, où des tapis de Perse brochés d’or témoignaient d’un luxe de bon goût. Bien que le comte eût alors quarante ans sonnés, il paraissait plus jeune que jamais, jeune de corps, d’esprit et de cœur.

— Voici ma femme, s’écria-t-il au bout de quelques minutes.

Marcella entra d’un pas léger, me tendant dès la porte ses deux mains, que je saisis avec empressement pour y déposer un baiser.

— Tu nous restes ? me dit Alexandre,

— Cela va de soi, interrompit Marcella. Il faut rester.

— Non, il faut partir.

— Ah ! et pourquoi, s’il vous plaît ? demanda-t-elle vivement.