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sucre ; l’autre jour, j’en entends une qui chicotte et se démène sous mon oreiller. »

» Le vieux Pilachko, de Toulava, est venu ce matin. Il s’est plaint de la dureté des temps, tous les malheurs fondent sur lui à la fois : la récolte manquée, la grêle, son bétail qui se meurt ; on allait lui vendre son bien parce qu’il doit au fisc 117 florins d’impositions. Il pleurait, le pauvre homme ; je lui ai avancé la somme dont il avait besoin. Il la rendra, je suis sûre de lui. — Figure-toi, Sacha écrit déjà dans la perfection depuis quelques jours. Je le regardais copier ses modèles avec ce sérieux qu’il a ; je lui demandai : — Pourquoi écris-tu comme cela tout le jour ? — Parce que j’ai besoin de le savoir pour écrire une lettre. — Et à qui veux-tu écrire ? — À mon papa donc !

» Cette nuit, je me suis réveillée en sursaut, et je t’ai appelé par ton nom, et, ne recevant pas de réponse, j’ai eu peur, je crois même que j’ai pleuré. Ah ! je m’ennuie seule, hâte-toi de revenir !

» Tout le monde est bien portant, et t’embrasse. »

« Encore absent ! j’ai pensé à te faire une surprise en commençant une broderie, puis j’ai réfléchi qu’il valait mieux étudier une nouvelle sonate à ton intention.

» J’ai un aveu à te faire. Tu te fâcheras peut-être, j’ai cédé à un mouvement de colère. Vihoura, le nouveau valet de ferme, est un homme brutal qui s’amuse à faire du mal aux bêtes. Je le lui avais dé-