— Puisqu’il ne veut pas se marier, dit Mrak, qui avait jusque-là écouté en silence, et qui reprit maintenant sa faction.
— Aïe ! aïe ! il aime encore l’autre, — s’écria tout à coup le Juif, qui avait fini par s’éveiller et s’était approché en sourdine. Sa face bêtement astucieuse grimaçait un vilain sourire.
— Mon cher, répliqua le capitulant, ta tête est un bain de vapeur où ta langue sue des sottises.
Tout le monde riait ; mon Juif me jeta un regard de reproche, tira ses manches, passa la main sur ses genoux, puis, contre son habitude, alla tarabuster ses chevaux, qui n’en pouvaient mais.
— Est-ce vrai ? dit gravement Kolanko à Balaban en le touchant du coude.
— Est-ce vrai que tu ne peux pas l’oublier ? répéta l’homme de carton d’une voix hésitante.
Le capitulant ne répondit pas. Un voile de tristesse était sur sa douce et honnête figure ; ses yeux avaient de nouveau ce regard humide, profond, qui vous remuait étrangement. Il y eut une pause, pendant laquelle on n’entendait que le pétillement de la flamme.
— Bêtises que tout cela ! s’écria enfin le Mongol.
— Tu devrais lui cracher au visage, à cette jolie comtesse de Zavale, éclata l’homme de carton.
— Qu’est-ce qui vous prend donc ? dit froidement le capitulant.
— Il était très pâle, et l’émotion avait contracté ses sourcils. — Tout cela n’a rien que de naturel… La pauvre fille avait trop de mal ; elle vit qu’elle pouvait tout à coup passer grande dame,…