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patient de placer son mot, figurez-vous qu’elle régnait déjà en maîtresse absolue. Le seigneur avait fait venir pour elle deux professeurs ; l’un était un Français. Elle apprenait tout ce que peut apprendre un scribe ou même un curé. Chaque semaine, la poste apportait un paquet de livres, et elle lisait tout, jusqu’aux gazettes, et il y en avait ! Dans sa chambre était une grande boîte en bois fin, là-dessus elle apprenait à jouer de la musique ; le soir, les gens s’arrêtaient sous ses fenêtres pour écouter.

Le Mongol se mit à ricaner en tisonnant avec une bûche qu’il tenait à la main. — Et dire que ces gens oublient qu’il y a une justice divine ! murmura-t-il entre ses dents.

Kolanko eut un accès de toux, et on l’entendit grogner en dedans comme un chat furieux. Le capitulant regardait devant lui, son visage demeurait toujours impassible, morne, désolé. Le petit Your aux cheveux de filasse dévisageait le Mongol d’un air insolemment étonné.

— Eh bien ! qu’est-ce que tu as donc à me regarder ainsi ? dit celui-ci d’un ton de défiance, en plissant sa face jaune et levant son nez fendu.

— Je me demande comment tu peux faire, compère Mongol, qu’il ne te pleuve pas dans le nez ? répliqua le gars.

Toute la bande éclata de rire. Le Mongol attrapa le petit Your par l’oreille, l’attira lentement à lui, puis le lâcha de même.

— L’avez-vous regrettée, votre Catherine ? de-