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LA JUDITH DE BIALOPOL

toutes les objections doivent tomber. Si cet insensé ne veut pas me laisser partir, je vous en supplie, au nom de votre ville, de votre honneur, de votre devoir, retenez-le jusqu’à ce que j’aie quitté ces murs.

Sans attendre le consentement du staroste, elle appela les soldats qui faisaient la garde dans le vestibule, et leur enjoignit d’arrêter son mari.

Comme obéissant à une puissance supérieure, les soldats s’emparèrent de l’hébreu, qui se débattait en vociférant, et l’enchaînèrent.

— Jetez-le au cachot, commanda Judith, et surveillez-le, jusqu’à ce que le staroste vous ordonne de le mettre en liberté.

Les soldats entraînèrent Abrahamek, qui jeta à sa femme un dernier et douloureux regard.

— Maintenant, je vous laisse aller sans crainte, dit le staroste en s’adressant à l’audacieuse femme. Vous êtes née pour vous faire obéir et saurez venir à bout de ces chiens de musulmans.

Les horloges de Bialopol sonnaient minuit quand, sur la lisière de la forêt, la terre parut se soulever, et deux figures enveloppées de manteaux, en surgirent comme des spectres.