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LA JUDITH DE BIALOPOL

— Comment le pourrais-je ?

— Comment ? répéta Judith qui frissonna, en me conduisant chez ton chef. Le reste me regarde.

— Et ton maître, ton époux ? objecta le Turc. Il serait capable de me tuer.

— Il n’en saura rien. Je connais les ruelles et les sentiers qui nous conduiront, inaperçus, hors de la ville. Nous fuirons ce soir même.

» Ne suis-je pas trop belle pour souffrir la faim et la misère ? Je veux faire ma fortune.

— Certainement.

— Tiens-toi donc prêt.

La jeune femme congédia d’un geste le musulman et continua de prier et de lire le livre de Judith.

Le soir, elle prit un repas abondant, but un vin excitant et se para de ses plus riches habits.

Une robe de soie blanche brodée de perles, relevée par une ceinture de perles également, enveloppait ses membres gracieux. Par-dessus, une tunique en drap d’or d’Orient, doublée et bordée de zibeline sombre, faisait ressortir sa taille, deux fois désirable sous l’obscure et caressante fourrure. Elle était chaussée de pantoufles orientales en cuir