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LA PANTOUFLE DE SAPHO

des cœurs rentrant victorieuse des jeux olympiques, Sapho lui parut être la divine Sophie elle-même, la femme fière et dominatrice, despotique en amour, comme en art. Il sentit alors combien follement il l’aimait, mais aussi à quel point le courage lui manquerait de jamais lui demander ses faveurs.

Grillparzer et Sophie fêtèrent ce soir un triomphe complet et qui ne devait être surpassé que plus tard, lorsque, en Médée, la Schrœder pétrifia littéralement son auditoire par le mot trois fois répété : « Malheur » !

C’est surtout à la tombée du rideau que les applaudissements devinrent délirants et, pendant que Sophie se voyait contrainte de paraître et de reparaître indéfiniment, le Polonais, saisi d’une idée subite, enjamba la rampe de l’orchestre et fut en quelques instants dans la rue.

Mlle Babette était, comme toujours, rentrée la première à la maison, afin de s’occuper du thé que Sophie aimait à trouver tout fumant sur la table. Elle haletait en montant les marches de l’escalier et tâtonna en cherchant le trou de la serrure. Soudain, une main glacée s’empara de la sienne et elle sentit une ombre se dresser près d’elle.