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LA PANTOUFLE DE SAPHO

Les modes gréco-romaines de ce temps permettaient à l’artiste une liberté d’habillement, telle que, de nos jours, on ne la concède qu’aux chanteuses d’opérettes. Une ample draperie blanche, retenue sur l’épaule par une agrafe en or massif, suivait de près le contour ferme et élastique des seins, laissant à découvert des bras superbes. Du côté gauche, tombait, le long de la hanche, un manteau écarlate brodé d’or. Séparée, au milieu du front, l’opulente chevelure se déroulait en anneaux le long des tempes et, retenue par un bandeau blanc tissé d’or formait un nœud de boucles sombres, qui retombaient sur la nuque.

Félicien tressaillit en la voyant ainsi. Elle lui sembla presque terrible. Dans la majesté de ses formes, il y avait une puissance presque violente qui le terrassait, et son pied délicat chaussé de sandales d’or appelait son baiser plus impérieusement que jamais ne l’avaient fait la main blanche ou les lèvres rouges d’une femme. Mais, quand elle commença de parler, quand sa voix merveilleuse résonna, pareille tantôt à un son de cloches, tantôt à un murmure de harpe, lorsque dans chaque mouvement s’exprima la grande âme de la poétesse adorée du peuple et souveraine