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LOUP ET LOUVE

entre les mains de Guillaume. Celui-ci ne sut rien lui dire de son maître, sinon qu’il errait dans les montagnes, « sans doute, remarqua le jovial musicien, pour y faire pénitence et se nourrir d’herbes et de racines, pendant que lui-même récompensait ses bonnes actions en les arrosant d’un vin pétillant. » Le chemineau-poète, avant de poursuivre sa route accompagné de sa truande, restitua honnêtement les beaux habits et les chevaux, reprenant en échange, ses haillons et son baudet.

Seule, Delphine retint la tunique de velours bleu bordée de petit-gris, et manda en retour à Vidal, un message de joie. Le gai jongleur parcourut, le jour même, la montagne en tous sens, s’arrêtant parfois sur les hauteurs, pour crier de toutes ses forces : « Vidal ! grand fou ! »

Et l’écho répondait : « Grand fou ! »

Enfin, vers le soir, Guillaume découvrit son maître assis près d’un torrent qui se précipitait avec fracas hors des rochers. Il parut ne point le voir et s’occupait à arracher du lierre et à en former des anneaux qu’il entrelaçait en chaînes. Il en était chargé, comme un prisonnier, du haut en bas.