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LA FEUILLE BLANCHE

ses meilleurs rôles et de fêter son plus grand triomphe, et, dans cet état d’esprit, elle prit le courage d’arracher le voile du mystère qui la tourmentait si cruellement.

Elle avait quitté son brillant costume de théâtre et revenait, toute rouge encore et animée de l’excitation de la scène, enveloppée d’un négligé de blanche mousseline recouvert d’une veste en soie bleue garnie de dentelles. Elle trouva Saint-Renaud assis près du feu et plongé dans de tristes pensées. Les jambes étendues, inertes, les mains dans les poches de son habit, il semblait ne pas remarquer la présence de l’aimée.

— Qu’as-tu depuis quelque temps ? commença-t-elle bravement. Te serais-tu ruiné par quelque spéculation ? Je veux le savoir. Ce n’est pas une honte d’être pauvre, peut-être même pas un malheur, et s’il arrive, ta petite Gaussin saura bien encore te faire rire.

— Quelle idée te prend ? les affaires vont mieux que jamais.

— Alors qu’y a-t-il ? Je lis sur ton visage que tu me caches un chagrin. Tu commences à maigrir.

— Tu te trompes.