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EAU DE JOUVENCE

autre, les cheveux dénoués, et enveloppée d’une sombre fourrure. Elle accueillit son adorateur avec un sourire annonçant les félicités prochaines. Il se laissa choir à ses pieds et elle l’entoura doucement de son bras.

— Aujourd’hui même, tu fêteras tes noces, commença-t-elle, rayonnante de bonté et d’amour. Mais, auparavant, je veux soulever pour toi le voile de mystère qui m’entoure. Mon bien-aimé, j’ai le double d’années que toi, et pourtant je suis aussi jeune.

— Explique-moi l’énigme.

— Tu sais le plaisir que j’éprouve à être cruelle.

» Cela date du temps où je commençais à perdre ma jeunesse. Avec elle, ma beauté commençait à s’évanouir. Un jour que je faisais décapiter un paysan révolté, je me tenais près de lui pendant qu’on lui tranchait le cou et son sang jaillit sur mes mains. Au bout de quelque temps, je fis la surprenante découverte que les rides en avaient totalement disparu. Arva, ma vieille nourrice, attribuant le phénomène au sang du décapité, lorsqu’un autre criminel fut condamné à mort, je fis couler son sang dans ce bassin et je m’y plongeai. Un mois plus tard, j’étais complètement