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LA PÊCHEUSE D’AMES.

sans cœur. N’y a-t-il aucune expiation ? Dieu ne peut-il pas être miséricordieux ? »

La malade se tordait les mains et regardait Dragomira avec des yeux suppliants.

« Il y a une expiation.

— Laquelle ?

— La mort.

— Si Dieu le veut, je mourrai.

— Il faut mettre fin vous-même à votre vie, vous offrir comme victime sur l’autel du Seigneur.

— Moi ?… moi-même ?… Non, non ! je ne veux pas mourir. »

La malade retomba dans son délire et se roula sur son lit en gémissant et en frissonnant. Dragomira avait allumé la petite lampe et lui avait mis son abat-jour. Elle jetait une lumière indécise dans la chambre et faisait de grands cercles brillants au plafond. Les spectres s’évanouirent ; la lune se montra, et devant sa sainte clarté disparurent aussi les nuages qui, comme une vapeur d’enfer, avaient rempli la maison de fantômes. La malade se calma.

Minuit approchait quand la vieille servante entra sans bruit et avertit Dragomira qu’un monsieur de Kiew était là et désirait lui parler.

Dragomira passa dans la chambre à côté et trouva Sergitsch.

« Nous ferons mieux de sortir dans le jardin, dit-il à voix basse et en regardant avec inquiétude autour de lui, j’ai de nouvelles instructions à vous communiquer. »

Dragomira passa devant. Ils s’avancèrent entre les buissons de groseilliers tout dénudés et arrivèrent à la tonnelle où pendaient encore quelques feuilles jaunes. Dragomira appuya son bras à un piquet et regarda Sergitsch avec une sorte d’inquiétude.

« Avez-vous le testament ?

— Oui.

— Donnez-le-moi ; voici l’ordre de l’apôtre. »

Dragomira lut le billet que Sergitsch lui avait présenté, tira le testament de son corsage et le lui remit.

« A-t-elle avoué ?

— Non, mais dans son délire elle a parlé d’un homme dont elle s’imputait la mort.

— C’était son mari ; son sang retombe sur elle.

— J’essayerai de la sauver.