Page:Sacher-Masoch - La Femme séparée, 1881.djvu/83

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
67
LA FEMME SÉPARÉE

Tout échoua, et des années s’écoulèrent durant lesquelles le comte nous visita fréquemment à Lwow, et Aaron resserra de plus en plus ses filets autour de nous.

— Et étiez-vous heureuse alors ? demandai-je avec intérêt.

Mme de Kossow secoua la tête.

— Je ressemblais, savez-vous, à cette princesse de la fable qui, ensorcelée par un mauvais sort, dort de longues années sur un lit d’or, dans un château de marbre perdu dans une forêt sombre, jusqu’à ce que le héros vienne, pour qui le sentier se trace, les serrures se brisent, et dont la voix ressuscite les engourdis.

— Et il vint !

Les yeux de la pauvre malade s’allumèrent d’une douce lueur, qui se répandit lentement sur son visage et l’éclaira joyeusement.

— Nous venions d’établir notre Constitution et les votes se préparaient ; le pays respirait, content d’être libre, après une guerre néfaste ; tous se réjouissaient, et mon mari plus que tout le monde, car mon père avait été présenté comme candidat, et s’il était nommé, mon mari rentrait en possession de sa charge. Cependant, la popularité de mon père était légèrement ébranlée par ses nombreux enfantillages. Il n’avait qu’un désir, couler ses jours pai-