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LA FEMME SÉPARÉE

— C’est vrai.

— Ne m’interrompez pas ! s’écria Mme de Kossow. La femme, antérieurement, n’a été créée que pour aimer, pour mettre au monde et élever des enfants. L’amour, par conséquent, ne doit-il pas tenir dans sa vie une place bien plus importante que dans celle de l’homme ? Chaque événement qui se rapporte à cet amour l’intéresse, tient une place dans ses souvenirs.

Pour l’homme, au contraire, l’amour ne tient qu’une place insignifiante à côté des fonctions qu’il est appelé à remplir dans l’État, dans la société ; ce n’est que rarement et pour un court espace de temps qu’il se laisse entièrement dominer par lui. Dans ce dernier cas, il s’y adonne plus complètement que la femme, qui en fait son esclave, sa chose, et profite de cette impuissance pour le subjuguer.

Qu’elle ne s’imagine pas cependant que ce revirement de choses est durable !

L’homme retombe en peu de temps dans le juste milieu, et bientôt la femme s’aperçoit qu’il n’est plus lié à elle que par son devoir et par ses enfants, mais qu’il se sent entraîné vers d’autres femmes par une puissance essentiellement sensuelle.

Plus la femme a été subjuguée par cet amour, plus elle en supportera difficilement la perte, et