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LA FEMME SÉPARÉE

Elle portait une robe de soie épaisse, couleur or bruni, dont la traîne courte bruissait en caressant les herbes ; une kasabaïka décolletée de velours pensée, bordée de petit-gris, vêtement splendide, avec des places grasses et luisantes aux coudes et sur le dos, et des endroits où la fourrure manquait. Ses cheveux étaient hérissés en papillotes tordues dans des papiers de toutes les couleurs.

Je mis pied à terre devant la porte, et la rejoignis dans le péristyle. Notre affaire fut vite terminée. Mme de Kossow me déclara qu’elle ne haïssait rien tant que la politique et que cela lui était parfaitement égal que celui-ci fût élu ou celui-là. Elle s’assit cependant à son élégant secrétaire, et écrivit ce que je lui demandais.

— Il faut que je vous fasse un aveu, commençai-je.

— Eh bien ?

— Le désir de gagner votre voix n’était qu’un prétexte favorable pour faire votre connaissance.

Mme de Kossow fronça ses fins sourcils et sourit.

J’avais une envie indicible de vous connaître.

— Moi ? Vous plaisantez !

— Je ne plaisante pas. Vous avez la réputation d’une femme extraordinaire, au-dessus des préjugés du monde, vivant à votre guise.

Mme de Kossow eut un sourire sombre.