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LA FEMME SÉPARÉE

il y a une flaque mousseuse habitée par des grenouilles. Le dauphin qui jadis crachait l’eau, a la gueule remplie de fleurs sèches qu’il semble mâcher d’un air lamentable.

L’herbe, qui tapisse toutes les allées, envahit effrontément les marches de l’escalier et s’étend jusque dans le péristyle aux dalles de marbre.

Je m’assieds, complètement résigné, sur un banc de bois, qui geint et crie sous mon poids comme une mendiante pleurnicheuse, et je regarde autour de moi.

À quelques pas, sur une plate-bande dévastée, est étendu le cadavre d’un petit chat noir et blanc.

Personne ne s’est donné la peine de l’enterrer.

Soudain, un scarabée vole et traverse l’air ; il paraît venir de loin et être très pressé. Il se pose sans façon sur le chat mort, puis descend gravement par terre. Il en fait le tour, comme pour mesurer exactement les dimensions : tout cela, très-calme, avec le grand sérieux qu’exige son emploi. Le brave petit animal est un frère de charité de la nature. C’est un Todtengraeber[1].

Il est revêtu du costume de cérémonie : tout en noir, avec deux taches d’un jaune rouge sur sa cara-

  1. Fossoyeur.