Page:Sacher-Masoch - La Femme séparée, 1881.djvu/23

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
7
LA FEMME SÉPARÉE

du monde, abandonnée de tous, dans sa seigneurie isolée. Personne ne pouvait donner de renseignements sur son compte. Il y a plus : je n’avais jamais entendu son nom, ce qui faisait que je la considérais comme un mythe. J’ignore comment j’acquis soudain la certitude que mon apparition de la forêt n’était autre que la femme séparée. Ces deux formes voilées de mystère se confondirent, à partir de ce jour, en une seule et même personne, sur la trace de laquelle je me jetai éperdûment et avec l’entêtement d’un chasseur.

J’entendis pour la première fois le nom de la femme séparée dans une société de bons voisins. On parlait justement de la corruption croissante de notre monde civilisé, des scandales de la société et de la désunion générale de la famille, qui trouble notre existence entière par son odeur de décomposition.

— Et cependant, qui a le cœur de fuir ouvertement cette peste des mœurs ? Celui qui se hasarde à le faire est repoussé par la société, et voué à une vie de paria, s’écria un jeune homme zélé, porteur de lunettes bleues. Mme de Kossow nous en offre un exemple bien remarquable. Comment le monde la juge-t-il, et… quel est son crime ?

— Qui est Mme de Kossow ? demandai-je précipitamment.