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LA FEMME SÉPARÉE

— Mais où irai-je ? demandai-je, découragée.

— Chez ton père, dit Julian d’une voix ferme. Il sera ton intermédiaire auprès de ton mari. Pendant ce temps, je te ferai meubler un appartement complet dans notre petite maison et tu t’y retireras avec tes enfants.

— Oh ! tu es bon ! — Je lui serrai fortement la main. — Mais hâtons-nous maintenant.

Je remontai avec Julian dans ma voiture. Turkul nous suivit dans son fiacre, qui stationnait devant la maison, et nous nous rendîmes chez moi. Il faisait presque nuit. Je gravis l’escalier à la hâte. Julian et Turkul veillaient à la porte en bas.

Ils eurent un moment d’anxiété bien cruelle en m’attendant.

Je pouvais trouver mon mari dans sa chambre, ou bien il pouvait revenir subitement. Julian et Turkul, qui regardaient aux fenêtres, virent une lumière poindre dans le cabinet de mon mari, puis disparaître.

— C’est fait, murmura Julian en suivant de l’œil la lueur qui traversait maintenant le salon, semblable à une colonne de feu.

— Montons chez elle, dit Turkul.

— Non, non, repartit Julian. Vois, tout est redevenu sombre.

Soudain des pas d’homme résonnèrent sur le