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LA FEMME SÉPARÉE

de cigares et de cadeaux de toute espèce, et qui supportait sans trop murmurer le poids de sa tendresse.

Un changement de garnison ravit à ma belle-mère son Adonis.

À partir de ce jour, elle nous visita chaque soir ; notre gaieté la réconfortait comme la meilleure des médecines.

Au bout de quelque temps, cependant, elle fut prise d’envie, et la jalousie qu’elle éprouvait à nous voir nous aimer, la mit dans une perpétuelle mauvaise humeur. Julian m’avait fait cadeau de deux charmants pistolets de chambre. Nous fixâmes une cible à la muraille, et nous nous amusions à tirer. Comme toutes les femmes, je tirais au hasard, presque sans viser, et, par là, très sûrement. Un soir que nous étions réunis comme à l’ordinaire, et que je me tenais là légèrement renversée en arrière, un pied en avant, la tête droite, le pistolet à la main et vêtue de mon élégante jaquette d’hermine, Julian, enthousiasmé, me désigna à ma belle-mère et murmura :

— Voyez donc, elle est admirable !

Quelques minutes après, l’éléphant blanc se leva en grommelant, serra son ouvrage, pria Turkul, qui était tout effaré, de lui offrir son bras et nous quitta très en colère. Lorsque Turkul revint, il riait à se tordre.