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LA FEMME SÉPARÉE

— Écoutez maintenant, reprit Mme de Kossow. Malgré l’espèce de culte qu’il professait pour le philosophe allemand Schopenhauer, auteur de cette phrase : « Le sexe court de taille, étroit d’épaules, large de hanches, aux jambes torses, ne pouvait être nommé beau que par notre sexe, à nous, que les sens aveuglent. » Notre honnête Würger était loin de mépriser les singes sacrés de Bénarès[1]. Sa vilaine grosse tête était bourrée d’une imagination toute pompéienne, et s’il ne pouvait jouer au faune lui-même, il provoquait quelque autre à se charger de ce rôle, et se pâmait en secret au récit de ses voluptés.

Un jour que Julian était en veine de générosité, il l’avait conduit dans notre villa et me l’avait présenté. Würger me regarda stupéfait, comme un objet tout à fait extraordinaire, et dit à Julian :

— Vous avez des femmes bien remarquables dans ce pays-ci ; si j’avais lu cette Kossow dans un livre, je l’aurais tenue pour absolument invraisemblable. Savez-vous ? j’aimerais la voir nue. Je n’ai pas besoin de demander si vous l’avez vue ainsi : vous n’y avez seulement pas songé.

— C’est vrai, repartit Julian.

Würger poussa un brutal éclat de rire.

  1. Comparaison de Schopenhauer.