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LA FEMME SÉPARÉE

séparerons pas, nous ne pouvons pas nous séparer. Je ne peux pas vivre sans toi. Tu es à moi. Je ne te quitterai pas.

Julian me releva, mais il ne me dit pas un mot.

— Le moment est venu, lui dis-je, où tu peux me prouver si tu m’aimes.

Il se mit à rire.

— Ne sois pas ainsi, tu me fais mal, suppliai-je en sanglotant. Si tu m’aimes tu ne me quitteras pas. Vois, je n’ai pas la force de me séparer de mon mari, d’abandonner mes enfants, et cependant je ne puis vivre sans toi. Consens à ce que notre liaison reste secrète, à ce que mon mari, mes parents n’en sachent rien, et nous serons heureux, Julian ! Réponds, oh ! réponds, je t’en conjure.

— Ce que tu exiges est grave, repartit Julian ; ce sera la première hypocrisie dont je me rendrai coupable. Et cependant, j’y consens.

Je pleurai longtemps d’émotion et de joie. Puis je tombai à genoux. Il me serra dans ses bras, et nous restâmes enlacés deux longues heures.

— Je me laisserai diriger par toi comme un enfant, dis-je. Je n’ai pas d’autre volonté que la tienne. Tu me rendras bonne par ton exemple. Oh ! je ne suis pas digne de ton amour !

Vers dix heures, à mon retour, comme nous nous préparions à prendre le thé, mon mari me dit :