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LA FEMME SÉPARÉE

et la flamme de l’amour brûlait entre nous, claire et pure. Ni l’un ni l’autre de nous ne laissait percer ce qu’il éprouvait, et cependant nous nous comprenions à merveille, et chacun sentait qu’il se serait sacrifié pour l’autre avec joie.

Mme de Kossow avait fini de réparer sa coiffure. Elle jeta un coup d’œil dans le miroir, puis, de la main, elle éloigna l’oiseau qui piaillait toujours, et vint vers moi, le bras appuyé sur le dossier de son siège.

— À ce moment, le comte devint plus séduisant, plus amoureux que jamais. Il justifia son silence et me fixa pour rendez-vous une ville d’eaux d’Allemagne où je comptais me rendre au printemps pour remettre entièrement ma santé. Je consentis.

Ce fut le même jour, dans la matinée, que j’appris que Julian avait une fiancée. Cela m’indigna. Je me crus trompée. Je m’imaginai qu’il se jouait de moi. Mon sang était comme en fusion. Ce fut dans cette agitation que me trouva Julian, lorsqu’il vint. Je me contins cependant, et lui montrai un visage aimable ; oui, et j’allai même jusqu’à lui parler de moi et de ma vie plus que je ne l’aurais voulu. Que voulez-vous ? lorsque quelqu’un m’était sympathique, je lui ouvrais mon cœur sans motif, et je me trahissais moi et mes amis. Je me plaignis donc de mon mari avec véhémence, je maudis mon sort, la