Page:Sacher-Masoch - La Czarine noire et autres contes sur la flagellation, 1907.djvu/93

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
77
LE MYRTHE DES AMANTS

— Je ne veux pas de votre argent, répliqua Lorenzo avec vivacité. J’aime votre fille Rachel, et je viens vous prier de me la donner pour femme.

— Seigneur ! ma fille ! s’écria le vieillard. Dieu vous a-t-il privé de votre raison ? Ne savez-vous pas qu’aucune Juive ne peut devenir la femme d’un chrétien, et moins encore d’un patricien ?

— Une Juive non, en effet, repartit Lorenzo, très calme ; mais Rachel m’aime et est disposée à recevoir le saint baptême.

— Le baptême ! ma fille ! ma Rachel ! se lamenta le Juif. Maudite soit l’heure où elle est née ! Vous avez ensorcelé ma fille, seigneur, vous avez séduit son esprit à l’aide de la magie. Ô ma Rachel !

— Tranquillisez-vous, fit Lorenzo, d’un ton conciliant. L’union de votre fille avec l’héritier d’une ancienne famille de Florence peut avoir des suites inappréciables pour le bonheur de votre peuple.

— Et les fiers Altoviti recevront une Juive dans leur maison, fût-elle dotée comme une princesse ?

— Je ne leur en ai pas encore parlé ; mais j’espère.

— Vous espérez ! reprit le Juif, soudain rassé-