Page:Sacher-Masoch - La Czarine noire et autres contes sur la flagellation, 1907.djvu/70

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
54
L’AMOUR CRUEL

sautant et criant comme des enfants. Tigris découvrait ses longues dents blanches. Elle choisit une nouvelle flèche, la posa sur la corde et visa juste cette fois.

L’arme s’ancra profondément dans la jambe droite du boyard.

— Vite, la jambe gauche, Zoé ! cria la czarine.

Zoé obéit. Elle ne visa qu’un moment et la flèche se plaça à l’endroit indiqué. Narda fit un signe d’approbation.

Les flèches volèrent ainsi l’une après l’autre, allant droit à leur but. Chaque boyard perdait le sang par plusieurs blessures. Le peuple, rempli d’admiration et de respect, approuvait les coups par des murmures et, à la fin, manifesta son enthousiasme par des cris sauvages.

Étrange concert que ces cris se mêlant au sifflement des flèches, aux plaintes des mourants et aux frais éclats de rire des jeunes femmes.

Mais la czarine détourna la tête.

— Finissez-en, dit-elle, il fait froid.

Elle ramena en un frisson son impériale pelisse autour de ses épaules.

À présent, chaque flèche éteignait une existence.