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L’AMOUR CRUEL

À sa gauche, Zoé, la Grecque, se tenait avec vingt autres femmes en tuniques rouges, bordées de zibeline, et portant des arcs et des carquois garnis de flèches. Derrière la justicière, Tigris, la négresse, était couchée sur une pierre moussue, vêtue de pourpre, un turban couleur de sang enroulé autour de la tête, un court et large coutelas pendait à sa ceinture.

Le czar était mêlé à la foule qui, tête nue, formait respectueusement un demi-cercle autour de la place sacrée. Des deux côtés, les boyards, somptueusement vêtus, les visages renfrognés, étaient ramassés en un groupe serré. La czarine les considérait d’un œil sombre.

Tout à coup Iégor parut, pieds nus, chevauchant un petit cheval à qui des cordes servaient de brides ; l’épée récemment forgée, pendait à son épaule.

— Dépose ton épée, commanda la justicière.

Iégor descendit de cheval, posa l’épée aux pieds de la czarine et se retira.

— Que quiconque se trouve lésé, commença Narda d’un ton solennel, se présente devant Dieu et devant nous, et porte sa plainte.

Un silence profond suivit ces paroles. Puis un