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L’AMOUR CRUEL

les boucles du grand czar, et le regard plane, solitaire comme un aigle, sur le paysage.

Une beauté triste atténue l’apparence rude et virile de Wladimir.

De hautes bottes en cuir jaune, de larges pantalons, une tunique bordée de zibeline, l’habillent noblement et fastueusement. Il s’appuie d’une main sur la peau de l’ours que sa lance a abattu, et son regard se perd dans les charmes de l’aimée, un regard chargé de mélancolie et d’un douloureux pressentiment.

Soudain, elle tressaille sous le coup d’une frayeur, puis regarde son amant et rit.

— Qu’as-tu ?

— Tu m’as fait peur.

— Comment ?

— Par ton regard.

— T’ai-je déplu, ma souveraine ?

— Ne m’appelles pas souveraine.

— Ne l’es-tu pas ? Le plus grand des czars, maître de millions de sujets, devant qui les empereurs de Bysance tremblent sur leurs trônes d’or, n’est il pas un esclave à tes pieds ?

— Toi, mon esclave ? et un éclat de rire répercuta son sarcasme sonore sous la voûte.