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L’AMOUR CRUEL.

Le bruit de son extraordinaire pénitence se répandit dans Smyrne et tout le peuple juif le proclama Élu de Dieu, Les hommes les plus considérables vinrent se faire bénir et instruire par lui. Un savant médecin qui le visita, fut frappé de l’arôme qu’il répandait.

— Comment peux-tu, lui demanda-t-il, toi, un homme craignant Dieu, te parfumer comme une fille ?

Sabbathai laissa tomber ses vêtements et le médecin put se convaincre qu’il n’avait ni aromates ni onguents sur le corps.

— Étrange, murmura le médecin.

— Je veux t’expliquer cette énigme, dit alors Sabbathai. Dieu m’a élu et, dans la même nuit, m’apparurent Abraham, Isaac et Jacob, qui m’ont oint de leurs mains. Depuis, mon corps exhale ces senteurs.

La réputation de Sabbathai allait croissant de jour en jour ; il n’y avait personne dans la ville qui ne l’admirât et ne le vénérât. Seule, sa jeune épouse ne l’admirait point, car elle l’aimait, et toute sa fierté de femme se révoltait contre sa force sainte et sa froideur.

En conséquence, le père de Sarah invita Sabba-