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L’AMOUR CRUEL

— Qu’est-ce que cela ? fit Mak terrifié.

— Cela ? c’est notre musique de noce. Cinq mille Dérewlans que j’envoie au czar Igor, en un sacrifice funèbre tel qu’on n’en a jamais vu depuis qu’on honore les morts et qu’on châtie les meurtriers.

— Femme, ne crains-tu pas les dieux ? cria le prince, après avoir fait de furieux et vains efforts pour se libérer de ses liens.

— Et toi, les as-tu craints, reprit Olga avec solennité, lorsque tu assaillis ton prince, en traître, par derrière ? Et tu croyais, aveugle que tu es, qu’une épouse vertueuse, une princesse de la maison Rurik, s’oublierait au point de laisser sans vengeance l’ombre sainte de son époux et de tendre la main à son meurtrier ? Tu croyais que je déchoirais au point d’accorder mes faveurs et mon amour à un esclave ? Aussi sacrilège que fut ton crime, aussi insultants pour moi sont tes espérances et tes désirs, aussi cruel sera ton châtiment. Tous ceux qui t’ont suivi, mourront, mais pas toi. La mort serait une grâce et je ne connais point la clémence. Tu ne mourras point.

Sur ces mots, la czarine sortit, laissant le prince étendu dans la chambre. Entourée de ses esclaves,