Page:Sacher-Masoch - La Czarine noire et autres contes sur la flagellation, 1907.djvu/242

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
226
L’AMOUR CRUEL

Bientôt entouré de Polonais, il tomba, frappé de plusieurs lances, sous les pieds des chevaux, qui passèrent en tempête sur son corps. Le sort de la bataille était décidé.

Pris entre les Tartares et les Cosaques, les cavaliers polonais durent arrêter leur élan. Une mêlée terrible s’ensuivit, inutile boucherie qui se termina par la fuite des vaincus. Les rangs de la fière noblesse se désorganisèrent complètement, chacun chercha le salut comme il put.

Des milliers trouvèrent la mort dans le combat, des milliers, dans la fuite.

Hemelnizki les poursuivit aussi longtemps qu’il resta un cavalier et un cheval qui ne fussent pas hors d’haleine. La nuit seule l’arrêta.

Les résultats de cette victoire étaient prodigieux. Les canons et les munitions de l’armée ennemie, leurs fourgons, leurs généraux et plus de dix mille prisonniers restaient aux mains des Cosaques. Près de quarante mille morts et blessés polonais couvraient le champ de bataille. Mais, mieux que tout cela, la légende de l’invulnérabilité de l’armée polonaise avait été détruite. Près des Eaux-Jaunes, Bogdan Hemelnizki avait fourni la preuve que des hordes non exercées pouvaient