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L’AMOUR CRUEL

avant d’agir. Personne de vous ne hait la Pologne comme je la hais. N’est-ce pas moi qui vous conduisis à l’insurrection, il y a cinquante ans ? Mais nous ne sommes pas en nombre et nous succomberons, comme nous avons succombé.

— Permettez-moi de vous contredire, répondit Hemelnizki. Autrefois n’est pas aujourd’hui, Les temps sont changés. La Pologne est, à l’heure actuelle, un fruit piqué des vers, prêt à tomber dans la main de celui qui voudra le cueillir. Pourquoi ne serions-nous pas celui-là ? Je connais la république et je connais les Cosaques. Là, c’est l’oligarchie, ici, l’égalité. Là, la tyrannie, ici, la liberté. Là, un pays sans foi ni loi et la division des partis, ici, la justice et l’union. Sitôt que vous prendrez les armes, tous les opprimés, les paysans que l’on maltraite, les dissidents dont on persécute la religion, les petits-russiens que l’on veut priver de leur langue et, avec elle, de leur âme, se lèveront et se grouperont autour de votre drapeau. L’orgueilleuse Pologne compte-t-elle un seul ami au delà de ses frontières ? Je ne lui vois de tous côtés que des inimitiés.

« Suédois, Hongrois, Russes, Turcs et Tartares sont prêts, au premier signal, à recommencer la