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L’AMOUR CRUEL

La lourde tenture se referma derrière lui avec un froissement solennel.

Les jours suivants, le maître de Tschérin ne se laissa point voir, et la belle Lidwine eut tout le temps de faire des comparaisons entre sa situation actuelle et celle qu’elle avait perdue, ce qu’elle fit en toute conscience et, quelquefois, contre sa volonté.

Au commencement, elle pensait à Hemelin avec attendrissement ; mais, bientôt, le luxe et le confort exercèrent leur séduction habituelle. Quel contraste entre les salles, l’ameublement et tous les objets qui l’entouraient à Tschérin, les repas qui lui étaient servis, les étoffes dont on la parait, et Hemelin, avec ses tables en bois blanc, ses mets grossiers, presque misérables ! La belle jeune femme glissait ses doigts fuselés entre les pointes dorées de la précieuse zibeline et songeait aux rudes peaux de moutons dont son mari l’avait enveloppée. Elle dut rire involontairement.

Une semaine se passa et Lidwine se plut à Tschérin.

Une deuxième s’écoula, et la jeune femme sentit qu’il ne lui serait plus possible de vivre à Hemelin.

Le staroste lui rendait visite tous les jours.