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L’AMOUR CRUEL

vous enfuîtes de Kaschau, comme un malfaiteur. Elle a refusé, avec une incroyable fermeté, de devenir la femme de Bethlen. Pour briser sa résistance, Georges Scetzi la fit jeter dans un cachot. Un jour, on l’amena au lit de son père mourant ; en même temps elle apprenait que vous l’aviez abandonnée. Alors, elle n’eut plus la force de résister au moribond et suivit Bethlen à l’autel.

— Ce serait vrai ?

— Je vous le dis.

— Et vous êtes convaincu… ?

— Absolument. Après une brève union demeurée sans enfant, elle devint veuve et retourna au burg de ses pères, où elle tient le bâton du commandement. Comment elle s’en acquitte ? Point n’est besoin de vous le dire. Vous savez mieux que moi si elle est née pour commander. Comme pour dédommager le héros de lui avoir refusé un fils, dame nature lui donna cette fille, véritable amazone. Gare à vous, Wesseleny ! Vous avez en elle un redoutable adversaire. Veillez sur votre tête et, plus encore, sur votre cœur.

— Je ne connais pas la crainte, dit Wesseleny en souriant. Ma poitrine sera cuirassée contre ses regards et contre les balles de ses fusils.