prodigieuse, dans un sanctuaire ; puis, attiré par le sourire de Nadège, il s’agenouilla et s’avança dévotement devant elle.
— Que faites-vous ? lui demanda la jeune femme surprise.
— J’avais promis de faire cela, répondit le paysan d’une voix tremblante.
Il ouvrit son sac, en tira un poulet dont les pattes étaient solidement attachées, et le déposa à terre comme une offrande devant la statue d’une divinité.
Nadège, que cet hommage embarrassait, essaya de plaisanter :
— Vous voulez me le vendre ? Combien ?
— Non, je ne le vends pas ; acceptez-le, et je vous remercierai, dit le paysan en joignant les mains.
— Avant tout, relevez-vous, mon ami.
Le vieillard se releva, et, après deux secondes de contemplation muette :
— Ainsi, c’est vous qui écrivez un si beau journal ?
— Vous le lisez ?
Le vieux paysan eut un froncement de sourcil.
— Pour cela, non, madame. Qui donc m’aurait appris à lire ? Mais, je sais écouter, et j’ai là, — ajouta-t-il en se frappant la poitrine — de quoi comprendre. Nous sommes cinq qui, les dimanches, nous réunissons le soir autour d’un baril de bière. Le chantre nous fait la lecture, et nous croyons être à l’église. Vous dites de belles choses pour nous autres, gens du peuple. Vous voulez nous grandir. Je n’ai pu résister à l’envie de vous voir,