Page:Sacher-Masoch - L’Ennemi des femmes, 1879.djvu/65

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
55
L’ENNEMI DES FEMMES

— Ah ! si je pouvais croire que Petrowna se méprend à ce jeu !…

— Laissez-la se méprendre ; vous êtes dans la bonne voie !

Le lendemain, Constantin apprit que toute la famille était partie brusquement pour Slobudka, le matin même. Cette annonce lui fut faite par un vieux cosaque resté au logis, pour tout mettre en ordre avant de rejoindre les émigrés.

Le major Casimir était là, quand Constantin reçut cette réponse. Ils se regardèrent avec des airs différents. Constantin était triste ; le major souriait. Le plus spirituel des deux croyait que tout était compromis par ce départ ; le plus sot s’imaginait qu’on le fuyait pour l’attirer.

Je n’ai rien dit des visites quotidiennes du major, parce qu’il n’y avait rien à en dire. Il arrivait solennellement, se postait en face de madame Pirowska, comme s’il eût voulu continuer la romance commencée vingt ans auparavant, et restait là, comme un ornement de salon, n’étant habile que pour mettre au courant le raffiné Diogène, auquel il racontait tous les matins ses prétendus succès de la veille, en concluant toujours : — Je fais du chemin, je fais du chemin !

Diogène hochait la tête, le renvoyait à son poste et attendait.

Le philosophe pensait intérieurement :

— Le niais se fera aimer de madame Pirowska ; mais la mère, qui est une femme habile, et avec la-