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L’ENNEMI DES FEMMES

femmes. Il avait lu Voltaire avec les grand’mères, récité Parny avec les mères ; il avait bien de la peine à ne citer ni Voltaire ni Parny aux filles et aux petites-filles.

Un beau matin, Constantin, qui n’avait pas été longtemps sans faire la connaissance de M. Barlet, se rendit chez l’aimable vieillard, et, carrément, lui demanda des leçons de français. M. Barlet, en pantalon gris, en gilet blanc, en frac bleu à boutons d’or, avec une cravate blanche immaculée, était debout, au milieu de sa chambre, et brossait son grand chapeau gris.

Il fit asseoir son jeune visiteur sur un petit canapé, au-dessous du portrait de Napoléon, entre la bataille de Marengo et celle d’Austerlitz ; puis, après un petit discours préliminaire, voulant s’assurer des éléments que possédait déjà Constantin, il le pria de lui lire à haute voix, dans un volume de Béranger, la chanson du Vieux caporal.

Lorsque Constantin eut fini, le professeur sourit et, d’un ton malin :

— Vous connaissez si bien la langue française, que vous n’avez plus besoin que d’un peu d’exercice, c’est-à-dire de conversation et de lecture. Je m’imagine que vous venez chez moi pour causer, mais non pas seulement avec moi.

— Excusez… monsieur Barlet.

— De quoi vous excuserais-je ? D’être jeune et d’être amoureux ?

— Vous avez deviné…