Page:Sacher-Masoch - L’Ennemi des femmes, 1879.djvu/40

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
30
L’ENNEMI DES FEMMES

Elle ne fit rien ; elle laissa les pans de son manteau et de sa robe effleurer l’eau ; elle ne se retroussa pas, et gravit l’escalier comme si, à chaque degré, elle eût été soulevée et portée en l’air. Pour le coup, le défi était insolent. Constantin entra dans l’église, se tint derrière un pilier et put voir tous les talons de bottes et de bottines de la population en prière, sans apercevoir rien que les plis rigides obstinément abaissés sur les seuls pieds qu’il voulût connaître. Il suivit Petrowna après la messe, elle entra et sortit, à chaque station, sans que notre curieux fût plus avancé.

Enfin, pour revenir chez elle, Petrowna dut prendre une petite ruelle, abominablement sale, qu’on appelait la ruelle des roses, par antiphrase, uniquement peut-être parce que la jeune fille y passait de temps en temps.

Cette fois, elle s’arrêta devant une flaque d’eau qui ressemblait à un petit lac et qui n’était complètement à sec que pendant la canicule.

Le cœur de Constantin se mit à battre. Il bénit le ciel humide, la boue, et il se bénit lui-même de sa persévérance. Planté quelques pas en arrière, il souriait triomphalement.

Tout à coup, la jeune fille se retourna d’un air résolu, et, toute frémissante, l’interpella vivement :

— Savez-vous bien, monsieur, qu’il est inconvenant de suivre une femme par un temps pareil ?

Constantin se découvrit respectueusement et répondit avec grâce :