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L’ENNEMI DES FEMMES

devant tous que je t’aime, que je t’ai toujours aimé, et que tu n’as pas besoin d’autre épreuve que celle-ci ; n’est-ce pas, mes amis ?

Tandis qu’elle attirait dans ses bras son mari qui s’était relevé, une acclamation unanime retentit.

Alors un homme sortit de la foule. C’était le vieux Gaskine, il s’avança vers Nadège, qui s’appuyait au bras de son mari.

— Panna, — lui dit-il, en la saluant avec émotion, — voilà de belles noces. Je savais bien qu’elles sonneraient un jour. Vous, pan Diogène, s’il ne vous est pas indifférent de savoir que le père Gaskine vous estime et vous demande la permission de vous aimer, soyez satisfait.

Le discours de Gaskine fut interrompu par un carillon de cloches qui sonnaient à toute volée. Jaroslaw, sur l’ordre de son père, avait couru dans l’église, et avait obtenu qu’on annonçât ainsi à tous les échos de la ville la grande fête improvisée.

Un cortège se forma pour reconduire jusqu’à la maison de Nadège ce couple extraordinaire. Une seule personne eut la force de bouder, mademoiselle Scharow ; quant à Melbachowski, dès qu’il apprit cet événement sans pareil, il se sentit stimulé par le désir d’en préparer un qui le valût. Il ne pouvait ni s’humilier devant Léopoldine, ni parodier, aux pieds de la directrice de la Vérité, la soumission de Diogène aux pieds de sa femme. Mais il réunit quelques jeunes gens, quelques fous de la ville, et