Page:Sacher-Masoch - L’Ennemi des femmes, 1879.djvu/294

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
284
L’ENNEMI DES FEMMES

me. Il envoya deux ou trois articles au journal de Lemberg. Mais dès qu’ils eurent été envoyés, il les trouva, ce qu’ils étaient peut-être en effet, détestables. Il écrasa sa plume, ferma brutalement son encrier.

— Elle écrit mieux que moi, se dit-il. Je ne suis même pas capable de remplir près d’elle les fonctions de mademoiselle Scharow ! N’est-ce pas à faire pitié ?

Diogène eut pendant quelques heures l’idée de se tuer. Mais la vue du pistolet lui fit honte ; c’était absolument comme si elle lui eût fait peur. Il se souvint qu’il s’en était servi dans deux occasions absolument ridicules : pour un duel avec Nadège, pour un duel avec le major. Il avait été deux fois vaincu. S’il se tuait, il le serait encore.

— Elle me pleurera moins qu’elle ne me méprisera, — se dit-il. — Non, il faut vivre, vivre pour m’en faire aimer, vivre surtout pour l’aimer.

Tout aussitôt il courut chez Nadège.

— J’allais aller chez toi, — lui dit-elle gentiment en lui prenant la main ; — j’étais inquiète. Je craignais une rechute.

— Tu avais raison, Nadège ; tu as toujours raison. J’ai eu une rechute, en effet

— Ta blessure ?

— Oh ! ce n’est pas la blessure du pistolet qui s’est rouverte ; c’est l’autre.

— Quelle autre ?

— Celle que je me suis faite moi-même par ma